1961 : les élèves découvrent la mixité

À quoi ressemblait la vie en classe quand filles et garçons ont commencé à partager les bancs de l’école ? Ce reportage auprès d'élèves de lycées parisiens en 1961 ainsi que les avis de parents et d'un médecin nous replongent dans les débats de l'époque sur la mixité. Une archive savoureuse de l'INA à découvrir sur france.tv.

On sait mieux leur parler quand on les voit tous les jours.
Une fille

Ce fut une révolution pédagogique : la création de classes mixtes au sein des établissements scolaires à la fin des années cinquante. Mais l’évolution des mentalités fut progressive.
« L’école mixte : pour ou contre ? » est un reportage de la RTF de 1961. Constitué par deux séries de « micro-trottoirs » réalisés à la sortie de « bons » lycées parisiens — les lycées Louis-le-Grand (garçons), Victor-Duruy (filles) et l’École alsacienne, pionnière en la matière —, les uns et les autres s'expriment sur l'opportunité des lycées mixtes. L'archive nous replonge dans les débuts de ce nouveau modèle éducatif, entre débats d’élèves, regards de profs et doutes des parents.

Extraits

Paroles de garçons
« Non, je ne suis pas spécialement pour, car en général le professeur est pour les filles. »
« Il peut y avoir des rapports de camaraderie qui sont très utiles. »
« Ça réduit les différences : les garçons s’efforcent d’être un peu moins bruts, un peu plus doux, et les filles aussi tâchent d’être un peu plus dégourdies qu’elles ne le sont d’habitude quand elles sont entre elles. »

Les qualités des filles : « leur sérieux », « elles sont assez franches et elles savent vous mettre à l’aise », « plus travailleuses ».
Leurs défauts : « elles nous font toujours des sourires pour avoir un devoir et on se laisse toujours prendre ».

Paroles de filles
« Les filles n’aiment pas être dépassées par les garçons, et les garçons n’aiment pas être dépassés par les filles, alors il y aurait un esprit de compétition. »
« Généralement, les garçons sont plus forts en mathématiques et les filles en français, et ça oblige à une certaine compétition. »

Les qualités des garçons : « la franchise », « moins mesquins que les filles ».
Leurs défauts : « le bavardage », « un peu brusques ».

Paroles de profs
« La différence essentielle porte sur le travail : les élèves dans un lycée mixte travaillent mieux. Pour la raison toute simple que les garçons sont piqués d’émulation. »
« Les relations entre garçons et filles me paraissent parfaitement saines… ils sont constamment en contact et ils apprennent ainsi à s’estimer. »

D’où vient la mixité obligatoire ?

À partir de la fin des années 1950, le gouvernement favorise la généralisation de la mixité scolaire. En 1959, notamment, le ministre de l'Éducation nationale Jean Berthoin décide de ne plus construire que des lycées mixtes. Les collèges d'enseignement secondaire (CES) — créés par la réforme Capelle-Fouchet de 1963 — sont mixtes dès l'origine. Toutefois, comme en témoigne « L’école mixte : pour ou contre ? », les lycées de garçons et les lycées de jeunes filles subsistent, et les mentalités évoluent progressivement.
Depuis les décrets d'application de la loi Haby en 1976, la mixité est rendue obligatoire dans l'enseignement primaire et secondaire.