Nationale Sept
Il faut la prendre qu’on aille à Rome à Sète
Que l’on soit deux trois quatre cinq six ou sept
C’est une route qui fait recette
Charles Trenet, extrait de la chanson « Nationale 7 »
C’est un axe routier aussi mythique que la route 66 aux États-Unis d’Amérique. Près de 1 000 kilomètres pour rallier la ville de Menton sur la Côte d’Azur depuis la porte d’Italie, à Paris. À l’époque où les congés payés débarquèrent dans la vie des salariés, l’autoroute des vacances n’existait pas encore. La nationale 7, si ! Il fallait donc l’emprunter si, bien évidemment, on cherchait à descendre dans le sud de l’Hexagone et sur la Côte d’Azur, plus particulièrement. Au bord de cette voie surfréquentée les jours de départ ou de retour, on faisait halte par nécessité mais aussi pour se sustenter. Aux vacanciers en transit s’offrait alors la possibilité de déjeuner dans l’un des restaurants idéalement implantés. Ils proposaient généralement une cuisine élaborée pour titiller le palais. On y dégustait des mets régionaux, des plats signature, voire on faisait escale chez celle ou celui mis en avant dans le célèbre guide rouge. C’était une autre époque et pour mieux en saisir toutes les spécificités, il faut remonter avant l’avènement de ces fameux congés payés, explorer cette période charnière qui a mis en lumière les chefs, revenir sur l’histoire de l’automobile et des premiers guides. Armé de ces riches et précieuses informations, on mesure alors véritablement ce qu’apporta la nationale 7 à notre appétence pour le bien-vivre et le bien-manger et à ces hauts lieux de la gastronomie qu’elle fit naître. « L’escalope de saumon à l’oseille arrive en 1962, explique Michel Troisgros. Parce que le saumon est pêché dans la Loire, qu’on leur ramène des beaux saumons, qu’il y a de l’oseille au jardin. Elle est belle, elle est fraîche. Le saumon est beau. Il y a une crème fraîche qui est du territoire, faite par un crémier qui a mis au point une crème très épaisse et qui à la première ébullition est veloutée. Ils (Les Frères Troisgros) mettent au point une escalope de saumon qui est envoyée, un aller-retour comme ça (en joignant le geste à la parole). Et tac, de la gestuelle, je mets la sauce sur l’assiette, je pose l’escalope en l’ayant cuit sur le moment et le plus vite possible, je l’amène au client. En ayant en tête que l’assiette chaude continue la cuisson du poisson entre moi et le client qui va plonger sa cuiller dedans. Pourquoi fait-on le service à l’assiette ? Parce que je veux que cela soit intact entre la cuisine et la salle, je veux que, moi cuisinier, vous ayez l’assiette que j’ai déterminée. »
La France a autant de cuisines locales qu’elle a de provinces. Chacune d’elles à ses plats, ses mets, ses spécialités, ses vins, ses fromages, son gibier, comme elle a ses paysages, ses sites pittoresques, ses villes d’art, ses châteaux et ses cathédrales. La variété de nos plats régionaux résulte et reflète pour ainsi dire la diversité unique au monde des aspects de la France.
Curnonsky, romancier, gastronome et critique culinaire
Vidéo : La Fabuleuse Histoire de la nationale 7
J’ai voulu montrer comment une simple route a façonné notre identité culinaire, transformant des spécialités régionales inconnues en trésors nationaux.
Stanislas Kraland, réalisateur, extrait de sa note d’intention

En route ! Quand la nationale 7 révolutionna la gastronomie française
Ancrée dans plusieurs siècles de traditions et d’habitudes, la France est universellement reconnue comme la patrie de la bonne cuisine et des bons produits. Cette réputation, notre pays la doit à une histoire qui se déploie tout au long du XXe siècle sur les routes de France, nationale 7 en tête, grâce à la démocratisation de l’automobile et à l’émergence du Guide Michelin. Tandis que les cuisines de nos régions gagnent leurs lettres de noblesse, de véritables dynasties de cuisiniers apparaissent et les chefs, à l’instar de Fernand Point à Vienne, Pierre et Jean Troisgros à Roanne, André Pic à Valence, la Mère Brazier ou encore Paul Bocuse à Lyon deviennent des personnalités publiques et médiatiques. Grâce à eux, la cuisine française va connaître sa plus grande révolution, et la France s’imposer aux yeux du reste du monde comme le grand pays de la gastronomie. Mais, au cours de la seconde moitié du XXe siècle, la France entre dans l’ère des fast-foods, des restaurants d’autoroute et subit alors la plus grande transformation qu’elle ait jamais connue. Grâce à des archives inédites, au témoignage des héritiers de cette histoire comme Michel Troisgros, Anne-Sophie Pic, Marie-Victorine Manoa (formée à l’institut Paul Bocuse, puis chez Michel Troisgros) ou encore Michel Chabran (ancien chef de la Maison Chabran avec 2 étoiles Michelin dans la Drôme), ce documentaire remonte le temps et la nationale 7 pour raconter cette page oubliée de l’histoire de la cuisine française et redonner vie à ses recettes les plus emblématiques.
Documentaire (90 min – 2025 – inédit) – Auteurs Stanislas Kraland et Nora Attia Wafa – Réalisation Stanislas Kraland – Commentaire écrit par Stanislas Kraland – Raconté par Juliette Armanet – Production Antipode, avec la participation du Centre National du Cinéma et de l’Image animée et de TV5Monde
Ce documentaire est diffusé mercredi 25 juin à 21.05 sur France 3
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