« Sur le front — Libre-échange : c’est notre nourriture qui trinque »

Une concurrence déloyale ?

France 5

Info & société

Dans ce nouveau numéro de « Sur le front », Hugo Clément se penche sur nos accords de libre-échange. Pourquoi les fruits et légumes cultivés à l’étranger sont-ils vendus moins chers que ceux poussant chez nous en France ? Que se passe-t-il avec le commerce mondial ? Réponses le lundi 10 novembre à 21.05 sur France 5.

Hugo Clément. © Winter Productions 

Des noisettes qui viennent de Turquie, du beurre qui provient de Nouvelle-Zélande, des lentilles qui ont traversé l’Atlantique depuis le Canada…
Dans nos rayons de supermarchés, on le sait, de nombreux produits sont importés de l’étranger. Mais pourquoi pèsent-ils moins lourd en caisse que ceux cultivés sur nos terres françaises ? 
Chez les agriculteurs, la colère gronde. Ils veulent une concurrence, mais à condition que la réglementation soit la même pour tous !
Pour mieux comprendre ce qu’il se trame au niveau du commerce mondial, Hugo Clément s’est donc penché sur ces accords de libre-échange que l’Europe signe avec de nombreux pays du monde entier.
Existe-t-il réellement une concurrence déloyale ?

Et l’enquête débute au cœur du rayon lentilles de nos supermarchés. Première surprise : quand on regarde les étiquettes de plus près, on s’aperçoit que la plupart des légumineuses proviennent du Canada… alors qu’elles poussent très bien dans nos sols français. Pourquoi ?
Pour tenter de comprendre cette aberration, Hugo Clément est parti à la rencontre de Benoît Merlo, cultivateur de lentilles dans l’Ain. Depuis plus de dix ans, cet agriculteur passionné prône une agriculture respectueuse de l’environnement et offrant une alimentation saine. Et en ce qui concerne la culture de la lentille, le combo est parfait. En plus d’être excellente pour la santé, la légumineuse ne nécessite ni arrosage ni engrais, mais juste du soleil et de la chaleur pour sécher avant la récolte de fin d’été. Pourtant, aujourd’hui, cette culture n’est plus suffisamment rémunérée. Et pour cause : le marché de la lentille a explosé outre-Atlantique !
Au Canada, l’équipe de Sur le front constate sur place l’étendue des champs de lentilles destinés à l’exportation. Mais font également un autre constat : les champs, encore verts, sont loin d’être asséchés. Alors, comment procéder à la récolte sans que le soleil ait asséché les champs ? Tout simplement en pulvérisant des herbicides destinés à tuer la plante alors qu’elle est encore vivante. Des résidus de produits chimiques que l’on retrouve évidemment dans nos assiettes…
« Nous avons aussi compris pourquoi les producteurs de noisettes, ou encore les éleveurs d’agneau, sont autant en difficulté en France, explique Hugo Clément. Ils subissent bien une concurrence déloyale, nous avons réussi à la filmer. Nous avons voulu suivre ceux qui se battent pour qu’on empêche les produits qui ne respectent pas nos règles d’entrer sur notre marché. »

Des séquences exceptionnelles

Preuve en images : des lentilles canadiennes importées en France sont aspergées de pesticides quelques jours seulement avant la récolte
Pour pouvoir récolter les lentilles (les graines), il faut que la plante meure. En France, ça se fait naturellement avec la chaleur de l’été. Mais, au Canada, il ne fait pas assez chaud au moment de la récolte. Les plantes sont donc tuées à coup d’herbicides épandus par avion. C’est une pratique totalement illégale en France, et pourtant les paquets de lentilles canadiennes et françaises se retrouvent côte à côte sur nos rayons.

On a fait les tests : on mange des résidus de glyphosate dans les lentilles canadiennes, mais pas dans les françaises
Nous avons fait analyser des paquets de lentilles : sur celles cultivées en France, on ne retrouve aucune trace d’herbicide, même quand elles ne sont pas bio. Mais, dans les sachets de lentilles canadiennes, on a trouvé des taux significatifs de glyphosate. Qu’on finit donc par consommer.

Monsanto et des producteurs de lentilles au Canada ont réussi à faire changer la réglementation européenne : les taux de résidus de pesticides autorisés ont été multipliés par 100 ! Jusqu’en 2012, la limite de glyphosate restant sur les lentilles était de 0,1 mg/kg. S’il y en avait plus, c’était illégal. En 2012, la limite est passée d’un trait de plume à 10 mg/kg, 100 fois plus ! Que s’est-il passé ? Monsanto, soutenu par les producteurs de lentilles canadiennes, a fait changer la réglementation européenne. Pour pouvoir importer plus de lentilles chez nous.

Les petits arrangements du dernier accord de libre-échange entre l’Europe et la Nouvelle-Zélande
C’est un accord qui était présenté comme « vert et juste ». Mais en y regardant de plus près, on se rend compte qu’il augmente les importations de beurre de Nouvelle-Zélande, à l’autre bout de la planète ! Il permet aussi d’augmenter les importations d’agneaux, alors qu’on n’impose pas aux éleveurs néo-zélandais les mêmes contraintes qu’en Europe. Ils font par exemple passer les moutons sous les douches de pesticides dont les substances sont interdites en Europe.

USA : comment des éleveurs ont arrêté le bœuf aux hormones pour pouvoir commercer avec l’Europe
Voici un exemple qui marche : nous sommes allés rencontrer les éleveurs de bœuf qui veulent commercer avec l’Union européenne au fin fond des États-Unis. Ils ne peuvent plus donner d’hormones de croissance aux bœufs destinés au marché européen – alors que ça se fait chez eux. Ils sont très souvent contrôlés pour que cette règle soit respectée.

Sur le front — Libre-échange : c’est notre nourriture qui trinque

Pourquoi la nourriture qui a poussé à l’autre bout de la planète est vendue moins chère en France que les produits cultivés chez nous ? Hugo Clément décortique nos accords de libre-échange. Il découvre les pratiques des agriculteurs à l’étranger et les conséquences directes sur les produits que nous achetons en France. On comprend concrètement pourquoi les agriculteurs français dénoncent une concurrence déloyale.

Magazine – Présentation Hugo Clément – Rédaction en chef Pierre Grange – Réalisation Andréa Orvain – Production Winter Productions – Coproduction France Télévisions 

Diffusion le lundi 10 novembre à 21.05 sur France 5 et sur france.tv 

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