« Au cinéma, plus le méchant est méchant, plus le film est réussi », déclarait le maître du suspense Alfred Hitchcock, qui, c’est le moins qu’on puisse dire, s’y connaissait en « méchant ». Difficile de faire plus méchant que le héros pervers et glaçant du Serpent. Difficile de faire série plus réussie.
En huit épisodes aussi troublants qu’addictifs, la série britannique suit le parcours du tueur en série Charles Sobhraj, faux diamantaire et vrai psychopathe français qui, dans les années 1970, sema la mort à travers la Thaïlande, le Népal et l’Inde. Son mode opératoire : aborder les touristes et routards (qui, par une cruelle ironie du sort, parcouraient justement en ces années-là le « hippie trail » en quête de réponses sur le sens de la vie), les droguer, les dépouiller et, au moins à une trentaine de reprises, les assassiner en abandonnant leurs corps dans des zones isolées.
Personne ne m’a jamais attrapé. Je m’attendais à ressentir de la culpabilité, mais... rien du tout. Je me suis senti libre.
Charles Sobhraj (Tahar Rahim) - « Le Serpent »
Surnommé le « Serpent », en raison de sa ruse mais aussi de ses multiples mues et identités (réemployant les passeports de ses victimes, il a longtemps échappé à la police avant d’être arrêté en 1976), Charles Sobhraj est une de ces figures monstrueuses qui fascinent, sidèrent, inquiètent et nourrissent – ou plutôt, hantent – l’imaginaire collectif. En portant son histoire à l’écran, à la fois sans manichéisme et sans concession, la série, construite autant comme un jeu de piste policier que comme un puzzle psychologique, tente d’approcher au plus près de la vérité du personnage, éclairant d’une lueur crue, et parfois insoutenable, la face la plus sombre de l’âme humaine.
Il fallait tout le talent de l’immense Tahar Rahim pour donner vie, corps et souffle à ce prédateur au sang froid. Passant en un dialogue, regard ou pincement de lèvres, de la colère sourde à une forme de suavité onctueuse, l’acteur révélé par Un prophète en 2009 apparaît tour à tour, voire simultanément, aussi éminemment sympathique que diaboliquement inquiétant. Son interprétation est à proprement parler vénéneuse : elle diffuse à l’ensemble de la série une force noire et ambiguë qui rejaillit sur les autres rôles (notamment sa compagne, interprétée par Jenna Coleman, à la fois effrayante et touchante en femme sous emprise : coupable autant que victime dans l’ombre du « Serpent », on ne sait jamais s’il faut la plaindre ou la condamner).
Le Serpent

L’histoire de l’escroc Charles Sobhraj et les tentatives remarquables du diplomate néerlandais Herman Knippenberg pour le traduire en justice. Se faisant passer pour un négociant en pierres précieuses, Charles Sobhraj et sa compagne Marie-Andrée Leclerc voyagent à travers la Thaïlande, le Népal et l’Inde en 1975 et 1976, commettant sur leur passage une série de crimes sur le « hippie trail » asiatique.
Série (8 x 60 min – 2021) – Créée par Toby Finlay et Richard Warlow – Réalisation Tom Shankland et Hans Herbots – Production ITV Broadcasting Limited
Avec Tahar Rahim, Jenna Coleman, Billy Howle, Ellie Bamber, Tim McInnerny…
Le Serpent, diffusé à partir du lundi 21 juillet à 21.10 sur France 2, est disponible dès le lundi 14 juillet sur france.tv
Prolongez l’expérience du « Serpent » jusqu’à la dernière page

On vous offre des exemplaires du livre « Moi, le Serpent » (éd. L'Archipel), les mémoires recueillis clandestinement par Jean-Charles Deniau, journaliste et réalisateur. Charles Sobhraj y raconte son enfance déracinée, sa jeunesse délinquante, ses trafics, son parcours judiciaire chaotique et les motifs réels de son départ pour le Népal.