L’eau, c’est la vie, comme on dit.
Mais, aujourd’hui, elle est au cœur de nombreuses préoccupations sanitaires et semble faire peser un risque sur notre santé. Dans certaines communes françaises, elle est même interdite à la consommation. Et pour cause : les nappes phréatiques sont envahies par des résidus pharmaceutiques, de pesticides ou de produits industriels. Dans la Beauce, par exemple, ce sont plus de 100 pesticides différents qui ont été recensés dans les eaux souterraines.
Pour les éliminer, il existe des techniques de traitement (comme le charbon actif, pouvant capter certains polluants), mais face aux métabolites de pesticides, ces molécules issues de la dégradation des produits chimiques, l’élimination devient presque impossible. La preuve : certains pesticides interdits depuis quinze ans sont encore présents aujourd’hui dans les sols. Lors de l’épandage, les pesticides pénètrent le sol, interagissent avec des micro-organismes et se transforment en nouvelles molécules. Ce sont les métabolites qui, année après année, contaminent durablement les nappes phréatiques. Et selon Xavier Coumoul, professeur de biochimie et toxicologie à Paris Cité, « certains métabolites peuvent être plus toxiques que la molécule originelle ». Entre 1980 et 2024, ce sont ainsi 4 600 sites de captage qui ont dû être fermés en France à cause de la présence de métabolites. Mais si les données scientifiques pour évaluer leur dangerosité sont encore très limitées, la méfiance grandit du côté des Français. Dans le Gard, par exemple, une hausse de cancers rares du cerveau dans une zone restreinte inquiète les habitants…
En parallèle, on tente de convaincre les agriculteurs de créer des zones sans pesticides. Près de Rennes, certains optent ainsi pour le désherbage mécanique ou la culture de sarrasin ou d’espèces naturellement résistantes aux parasites. En échange, les agriculteurs ont accès aux cantines scolaires pour vendre leurs produits.
Des solutions à la maison ?
De nombreuses solutions sont proposées pour traiter notre eau à la maison : perles de céramique, bâtonnet de charbon actif, carafes filtrantes… Pour chacun de ces produits, la promesse d’une eau pure est avancée par les fabricants. Mais leur efficacité reste partielle : ces techniques retiennent souvent entre 10 et 15 % des polluants et, finalement, peu de métabolites. Seul l’osmoseur domestique filtrerait jusqu’à 90 % des polluants, y compris les métaux lourds et les pesticides. Mais cette installation a un coût et pose le problème démocratique de l’accès à une eau de qualité.
Et l’eau en bouteille alors ? Pas forcément mieux. Des microparticules de plastique, notamment issues des bouchons, sont présentes dans presque toutes les eaux minérales. Selon la chercheuse Mathilde Body, le plastique pénètre facilement l’organisme et pourrait aggraver des troubles digestifs ou neurologiques. Sans parler du désastre écologique des bouteilles en plastique…
Et l’eau vendue en bouteille de verre ? Elle n’est pas épargnée également. Le plastique est déjà présent dans les sources elles-mêmes tant il est omniprésent dans notre environnement.
Eau en bouteille ou eau du robinet ?
Alors, qui remporte le match ? Pour les scientifiques interrogés dans le documentaire, c’est l’eau du robinet qu’il faudrait privilégier. Elle est en effet davantage contrôlée et plus régulièrement testée que l’eau en bouteille. Mais si le choix reste personnel, il est aussi collectif. Pour Mathilde Body, il faut voir plus grand, au niveau de la société, et plus loin également, dans le temps, réfléchir aux enfants, petits-enfants…
Quelle eau et quel monde voulons-nous pour demain ?

Enquête de santé – Quand l’eau sème le trouble
Enquête de santé propose une soirée consacrée à l’eau. Le documentaire de Bruno Timsit sera suivi d’un débat animé par Marina Carrère d’Encausse.
Scandale des eaux minérales, eau du robinet polluée : c’est toute l’eau qui est troublée en France. Avec les révélations des traitements illicites utilisés pour certaines eaux minérales s’ajoute une autre réalité inquiétante : celle de la pollution de l’eau du robinet. Car l’eau du robinet a beau être l’un des produits les plus contrôlés de France, elle n’est pas épargnée par la pollution. Pesticides, polluants éternels, traces de médicaments… Ces substances rejetées dans l’environnement se retrouvent dans l’eau que nous buvons. Quels sont les effets de ces substances chimiques sur notre santé ?
La France est l’un des pays où l’on consomme le plus d’eau en bouteille dans le monde : 135 litres par an par Français, en moyenne ! Mais ces eaux, qui coûtent au consommateur entre 300 fois et 1 000 fois plus cher que l’eau du robinet, ne sont pas non plus épargnées par la pollution, et notamment par la présence de microparticules de plastique dans les bouteilles d’eau plate et gazeuse les plus vendues en France.
Eau en bouteille ou eau du robinet ? C’est sur le terrain de la santé que se joue désormais notre choix. On peut bien sûr comparer les prix, sélectionner une eau parce que son goût nous plaît, mais pour être certain qu’une eau est bonne pour la santé, il faut pouvoir juger de sa qualité. Et pour les consommateurs, ce choix n’est plus si limpide. Alors est-il encore possible aujourd’hui de consommer une eau dans laquelle quasiment tous ces polluants seraient éliminés ? Et entre l’eau minérale et l’eau du robinet, qui remporte le match de la santé ?
Avec comme invités :
– Yves Levi, professeur de santé publique-environnement, membre des Académies de médecine et de pharmacie
– Mickaël Derangeon, maître de conférence en physiologie à Nantes-Université, vice-président chez Atlantic’eau (service public en charge de l’eau potable sur 148 communes en Loire-Atlantique)
– Ingrid Kragl, directrice de l’information chez Foodwatch et autrice de l’enquête sur la fraude alimentaire « Manger du faux pour de vrai » (éd. Robert Laffont)
– Isabelle Tostivint, néphrologue.
Présentation Marina Carrère d’Encausse
Documentaire (52 min – 2025) — Réalisation Bruno Timsit — Production 17 Juin Média
Diffusion le mardi 1er juillet à 21.05 sur France 5
À voir et à revoir sur france.tv