Depuis quinze ans, Elon Musk inonde Twitter / X. Près de 80 000 messages, une autobiographie numérique rédigée en direct qui dévoile ses obsessions, ses ambitions, ses mensonges... Avec l’aide de data analysts, les équipes de « La Fabrique du mensonge » ont décortiqué chacun de ces tweets. Quel est son projet idéologique ? Est-il une menace pour la démocratie ? Un documentaire suivi d’un débat présenté par Thomas Snégaroff, à voir dimanche 12 octobre à 21.05 sur France 5 et sur france.tv.
« Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets ».
Comprendre ce qu’il tweete permet de mieux comprendre quels sont ses objectifs personnels, économiques, idéologiques ou politiques.
Adel Mebarki, data analyst – Foresight
C’est une autre facette du milliardaire le plus médiatisé de la planète : un matériau brut qui révèle comment Musk a bâti son propre récit, imposé son influence et, en quelques caractères, secoué les marchés, orienté l’opinion publique, menacé les fondements de la démocratie.
Derrière l’image du visionnaire qui veut sauver l’humanité se cache un patron autoritaire, imprévisible, dont la fortune et la puissance dépassent celles de nombreux États. Ses décisions impulsives, son idéologie, son ambition planétaire : tout était déjà là, écrit noir sur blanc, depuis le début.
Pour nourrir cette enquête, l’équipe de La Fabrique du mensonge a eu accès à des échanges personnels exclusifs et recueilli des témoignages inédits : proches, membres de sa famille, anciens associés et salariés. Autant de voix qui lèvent le voile sur un personnage brutal, à la fois géant de la tech, influenceur mondial et acteur politique.
Elon Musk a 28 ans lorsqu’il revend PayPal, sa deuxième société, à l’entreprise eBay pour plus de 1 milliard de dollars. Il va alors pouvoir investir dans un autre secteur qui le passionne : la conquête spatiale. « Depuis qu’il est tout jeune, rappelle le chercheur David Chavalarias, auteur de Musk en 50 tweets, il est obsédé par l’effondrement de l’humanité, de la vie sur Terre, et par le fait qu’il faut aller sur Mars. » Avec la création de sa société Space X, il a pour objectif à long terme « de rendre la vie multiplanétaire ». À l’époque, il s’inquiète du changement climatique, est proche des démocrates et devient le principal fournisseur de la Nasa.
En 2010, il publie son premier message sur Twitter, « la plateforme des gens qui font l’opinion »,dont il fait sa plateforme de communication pour ses entreprises, et particulièrement Tesla, le constructeur de voitures électriques. En 2018, une Tesla avec un mannequin au volant est envoyée dans l’espace. « En direct de la salle de contrôle de Space X, il y a une voiture en orbite autour de la Terre » : ce tweet propulse la célébrité de Musk.
Jusqu’en 2020, il publie 9 547 tweets et compte 31 millions d’abonnés. Ses messages dépourvus de filtre – contrairement à la retenue qui caractérise les chefs d’entreprise – touchent un large public.
« Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets ».
Maintenant Twitter / X fonctionne comme un amplificateur de fausses informations ou de posts extrémistes, et lui participe personnellement à ça.
Eddie Perez, ancien responsable de l’intégrité civique chez Twitter
À partir de 2021, Elon Musk tweete davantage et différemment : « C’est la période, explique le data analyst de Foresight Adel Mebarki, où il va interagir avec des comptes plus clivants et partager des contenus plus clivants. » Un virage déjà amorcé pendant la période du covid où il publie des tweets conspirationnistes qui remettent en question la dangerosité du virus.
En 2019, il a quitté la Californie démocrate pour installer ses entreprises dans l’État conservateur du Texas. Et, en 2021, sa rupture avec le camp démocrate est actée lorsqu’il est écarté par la Maison-Blanche lors d’un sommet dédié aux constructeurs automobiles : on ne lui pardonne pas son opposition à la création d’un syndicat dans son entreprise, mais surtout son virage à droite.
En 2022, il acquiert le média social et « organise une purge idéologique et du personnel », selon Quinn Slobodian, historien et auteur du Capitalisme de l’apocalypse. Il rétablit 62 000 comptes supprimés pour haine en ligne, injure raciste, désinformation, « tous débloqués au nom de la liberté d’expression », rappelle Rick Wilson, fondateur du Lincoln Project, think tank républicain. « Il vient de se doter d’un des meilleurs outils pour gagner la bataille culturelle », rappelle la députée européenne Aurore Lalucq.
Elon Musk commence à inonder la plateforme de messages et devient la personne la plus suivie sur Twitter avec 133 millions d’abonnés. Mais n’hésite pas ensuite à manipuler les algorithmes pour accroître davantage son audience.
« Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets ».
C’est une alliance politique, ils sont complémentaires : l’un capte le peuple, l’autre capte les flux.
Asma Mhalla, auteure de « Cyberpunk, le nouveau système totalitaire », à propos de la relation Trump-Musk
En 2023, Twitter devient X. L’année suivante, il affiche publiquement son soutien à Donald Trump lors de la campagne présidentielle : il tweete deux fois plus, et la moitié de ses contenus sont politiques. Ses audiences deviennent stratosphériques, surtout lorsque les tweets sont mensongers : « On peut aisément dire, affirme Adel Mebarki, qu’Elon Musk sur cette période temporelle est le plus grand influenceur trumpiste actif sur la plateforme Twitter. » Lorsque Trump accède au pouvoir, il octroie à son plus grand soutien la direction du département de l’Efficacité gouvernementale, le Doge, qui se lance dans une gigantesque chasse aux coûts, avec des licenciements massifs et des coupes drastiques de budget.
Il y a une croyance dans la Silicon Valley selon laquelle les patrons représentent une vision du monde qui doit remplacer la démocratie. Ils croient au pouvoir illimité de l’argent, ils croient au pouvoir d’une gouvernance exercée par une très petite catégorie de personnes.
Rick Wilson, fondateur du Lincoln Project, think tank républicain
Elon Musk réalise ainsi le rêve de technocratie de son grand-père, une figure d’extrême droite très controversée au Canada, qui a choisi de s’établir en Afrique du Sud pour soutenir le régime de l’apartheid. Le milliardaire y a grandi et son père, Errol, qui témoigne dans ce film, n’hésite pas à déclarer aujourd’hui : « Pour nous, l’apartheid signifiait que nous n’avions pas d’insécurité dans le pays… À cette époque, nous avions la loi et l’ordre. »
Sur X, Elon Musk offre une audience inédite à la théorie mensongère du génocide blanc en Afrique du Sud, reprise par Trump à la Maison-Blanche. « C’est faux, martèle Lindie Koorts, historienne, spécialiste de l’apartheid, et ça minimise la violence contre les Sud-Africains noirs. »
L’alliance entre l’homme politique et le milliardaire n’aura pas duré : fin mai 2025, Elon Musk quitte le Doge et se retourne contre Trump en publiant un tweet l’accusant de figurer dans le dossier Jeffrey Epstein.
Si les critiques explosent dans ses entreprises et dans la rue, l’homme le plus riche de la planète poursuit son œuvre d’influenceur planétaire en soutenant notamment les mouvements d’extrême droite européens. Et a créé son propre parti. Pour le bien du plus grand nombre ou pour le sien ?
« Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets ».
Mon fils Xavier est mort, tué par le virus de la pensée woke... J’ai juré de détruire le virus de la pensée woke après ça.
Elon Musk, à propos de sa fille aînée Vivian, transgenre
La Fabrique du mensonge propose une sélection de ses documentaires les plus emblématiques en version podcast.
Chaque semaine, un nouvel épisode propose à l’auditeur de plonger dans l’univers des fausses informations et de leur fabrication. Quelques semaines après leur diffusion sur France 5, les nouveaux numéros sont également disponibles en version audio.
Un podcast disponible sur les plateformes d’écoute Apple Podcasts, Spotify, Deezer, Castbox, Amazon Music et l’application Radio France.
Actuellement, en ligne : États-Unis : une élection sous IA
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Sur la piste des agents de Poutine
Espace : les fake news contre-attaquent
La Fabrique du mensonge
Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets
« Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets ».
Cette collection documentaire explique comment naissent et se propagent les fausses informations, qui en sont les instigateurs et comment ont contre-attaqué ceux qui en ont été la cible.
Documentaire (74 min – 2025) – Réalisation Pierre Zéau et Jaouhar Nadi – Production Babel Doc et Together Media, avec la participation de France Télévisions
Elon Musk : la conquête du pouvoir en 80 000 tweets est diffusé dans La Fabrique du mensonge dimanche 12 octobre à 21.05 sur France 5
À (re-)voir sur france.tv
Les master classes avec Lumni
Depuis le lancement de la collection en 2019, l’équipe de La Fabrique du mensonge part régulièrement à la rencontre des collégiens et des lycéens afin de les sensibiliser aux dangers de la désinformation et des fausses informations. Un rôle essentiel avec la multiplication des canaux et des sources d’informations et face à la rapidité de la propagation de l’information.
