« Survivantes », immersion documentaire au sein d’un centre d’hébergement pour femmes victimes de violence

En 2022, en France, 118 femmes sont mortes tuées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Pour l’année en cours, leur nombre s’élève à 95. Chaque année, elles sont 220 000 à subir des violences conjugales. Seules 18 % d’entre elles portent plainte. Des chiffres qui soulignent, s’il en était besoin, encore davantage l’urgence d’accueillir, accompagner, prendre en charge ces victimes, mais aussi la nécessité de faire progresser la société dans son ensemble, travailler à l’élimination des discriminations et des inégalités qui génèrent violences sexistes, sexuelles et relations d’emprise. Malgré la libération de la parole, malgré #MeToo, malgré les engagements du président de la République et le fameux « Grenelle des violences conjugales » lancé en 2019, rien ne semble changer et il manque encore au moins 4 500 places d’hébergement spécialisé en France. Que recouvre la réalité de ces chiffres ? De quelles vies, de quels déchirements, de quelles peurs, de quels combats témoignent-ils ?

Il y a une violence étatique qui vient s’accumuler avec celle que ces femmes ont pu vivre. Ce n’est pas acceptable.

Assistante sociale au centre Flora-Tristan

Décrivant le long chemin de croix de ces femmes en quête de sécurité, pour elles et leurs enfants, le réalisateur Éric Guéret, déjà auteur du remarquable Amour à mort pour France 2 (2020), s’est immiscé dans les couloirs du centre Flora-Tristan, premier centre d’hébergement pour femmes victimes de violences ouvert en France. Là, dans ce grand pavillon dont la localisation doit être tenue secrète, elles sont une poignée à avoir osé fuir – souvent au péril de leur vie. Elles bénéficient, pour un temps donné, mais pour un temps seulement, d’une chambre, d’un lit, d’une cuisine. Patiemment, douloureusement, elles tentent de se reconstruire : porter plainte, mettre des mots sur ce qu’elles ont subi, devoir parfois chercher un nouveau travail, trouver un logement, gérer la garde des enfants, leur scolarité, etc. Avec discrétion et empathie, le réalisateur filme le quotidien des victimes et de celles et ceux, assistantes sociales, juristes, psychologues, socio-esthéticiennes, qui leur viennent en aide avec bienveillance et combativité. Survivantes raconte les espoirs autant que les déconvenues et pointe du doigt les terribles manquements de notre société.