« Les Sentiments », de Noémie Lvovsky, suivi du documentaire « Bacri, comme un air de famille »

Disparu il y a deux ans, Jean-Pierre Bacri – l’éternel râleur du cinéma français – touchait ses contemporains parce qu’il n’a cessé de s’élever contre les injustices et la bêtise. Vendredi 27 janvier, à partir de 21.00, France 5 lui rend hommage avec une programmation spéciale : le film « Les Sentiments » dans « Place au cinéma », présenté par Dominique Besnehard, sera suivi du documentaire « Bacri, comme un air de famille ».


À 21.05 Film : « Les Sentiments »

Jacques, médecin, et Carole, son épouse, habitent une maison en région parisienne. Dans la maison voisine s’installent François et Édith. Ce dernier doit succéder à Jacques et reprendre sa clientèle. Jacques passe beaucoup de temps avec François pour lui transmettre sa succession. Carole et Édith, pendant ce temps, deviennent amies. Très vite, Jacques tombe amoureux d’Édith. Elle est tout d’abord émue par le trouble qu’elle provoque chez lui. Puis elle se met à l’aimer. Mais elle ne voit pas qu’elle est également « amoureuse d’elle-même en train d’aimer ». Elle ne voit pas non plus qu’ils courent vers la violence des sentiments…

Les Sentiments

Fiction (94 min – 2003) – Réalisation Noémie Lvovsky 
Avec Jean-Pierre Bacri (Jacques), Nathalie Baye (Carole), Isabelle Carré (Édith), Melvil Poupaud (François), Agathe Bonitzer (Sonia)

Les Sentiments est diffusé vendredi 27 janvier à 21.05 sur France 5

Jean-Pierre Bacri
Isabelle Carré (Édith) et Jean-Pierre Bacri (Jacques).
© Hirsch / ARP / TF1 Films Production

À 22.35 Documentaire : « Bacri, comme un air de famille »

De lui, Lino Venturadisait que c’était « un type formidable » : une consécration pour celui qui garda toute sa vie une admiration sans bornes pour l’acteur.Jean-Pierre Bacri ne se rêvait pas comédien. L’enfant né en Algérie, qui grandit à Cannes, rencontra la scène par hasard. Le cinéma lui réservera pourtant une place à part. Avec Agnès Jaoui, ils formeront un couple unique d’auteurs, de scénaristes et de comédiens. Ensemble, ils recevront quatre Césars, deux Molière et un prix à Cannes. 
Il n’a pas aimé la ville du cinéma qui l’a vu grandir, après avoir quitté l’Algérie avec les pieds-noirs à l’âge de 10 ans. « C’est lamentable, ces villes de province, surtout Cannes… » Il s’ennuie à l’école, commence une carrière de banquier, puis à 23 ans s’en échappe et monte à Paris : « Pouvoir ne pas me raser, ne pas me lever tôt, échapper aux contraintes : ça a été ma devise maîtresse à partir de là. » C’est à Paris qu’il découvre l’art dramatique : une révélation ! Il est engagé par le metteur en scène de théâtre populaire Jean-Pierre Bouvier pour une tournée avec la pièce Lorenzaccio : il y rencontreGérard Darmonet Sam Karmann, qui deviendront ses amis. 
Il doit le premier tournant de sa vie professionnelle à Roger Hanin, qui lui propose d’intégrer sa troupe qui prépare Henri IV, en 1982. Celui-ci lui présente Alexandre Arcady, qui lui ouvre les portes du succès au cinéma dans Le Grand Pardon, puis Le Grand Carnaval. Mais, après plusieurs films du même style, il prend une décision : « Je me suis mis à genoux devant moi-même : “Je t’en prie, arrête les films de pieds-noirs !” et j’ai tenu parole. »
En 1983, le film Coup de foudre, de Diane Kurys, le propulse vers le statut de second rôle le plus demandé. « Jusqu’à 30 ans, j’étais une espèce de crétin parfait qui reproduisait ce qu’on lui avait dit de faire… À un certain moment, je me suis mis à réfléchir. »
Mais c’est au théâtre, dans une mise en scène de Jean-Michel Ribes, que sa vie bascule à nouveau. Il interprète le rôle principal de L’Anniversaire de Harold Pinter. Dans un rôle secondaire, une jeune débutante : Agnès Jaoui. « Au bout de deux ou trois semaines, ils étaient fous amoureux l’un de l’autre », se souvient Jean-Michel Ribes. « Grand séducteur, Jean-Pierre, raconte son grand ami Sam Karmann. Et là je vois dans son regard… amoureux ! Je ne connaissais pas ce regard, et c’était magnifique. J’ai vu que c’était quelque chose de fort ! » Pour la scénariste Attica Guedj : « L’explosion magnifique a eu lieu grâce à sa rencontre avec Agnès, dans cette collaboration qu’il a trouvée dans l’écriture avec elle. Il y a quelque chose qui s’est épanoui. » Comme le rappelle Ribes, « cette rencontre a permis d’engrosser le cinéma français de beaucoup de films, de pièces de théâtre… » Le « couple Jabac » devient inséparable dans la vie comme dans l’écriture. Le succès arrive dès leur première pièce : Cuisine et dépendances
Alain Resnais fera appel à eux pour écrire le scénario de trois de ses films. Jean-Pierre s’est souvenu alors de ses jeunes années en Algérie. Dans le cinéma où son père était aussi caissier pour boucler les fins de mois, il a vu Hiroshima mon amour et raconte : « On est tous partis avant la fin parce qu’on ne comprenait rien, on était stupéfaits par cet ennui ! »
De ce père facteur, il a également gardé en mémoire ce principe de vie : « Mon père n’était pas un érudit, il me disait : “Un balayeur et un président de la République, c’est la même chose, un homme est un homme.” C’est un principe de base qui m’a formé. » Celui qui avait commencé au théâtre par une scène du Misanthrope n’interprétera finalement jamais ce rôle qu’il rêvait de jouer. L’homme engagé qui affirmait : « Humanitairement, je veux bien faire la pute ! Ça ne me dérange pas du tout » était plus que tout attaché aux valeurs de l’universalisme : « On n’est jamais très loin de la connerie avec les racines ! Il faut s’arrêter assez tôt avant d’être con… »

Verbatim

« J’ai vu une présence surtout, cette puissance incroyable qu’il avait à l’intérieur de lui, et puis cette espèce d’humour un peu désespéré. »

« Déjà il y avait une forme de modernité incroyable, un ton, un style à lui. »
Jean-Pierre Bouvier, metteur en scène et comédien

« Ce qui me plaît, c’est cette espèce de déprime charismatique qu’il affiche, cette mauvaise humeur légendaire… Je suis très fan de sa personnalité. »
Isabelle Adjani à propos de Bacri lors du tournage de Subway

« Jean-Pierre, c’est comme un instrument de musique, une musique qui sonne juste tout le temps, qui est parfaitement accordée parce qu’il a sa façon à lui de ponctuer ses phrases, d’amener de l’humour, de la légèreté dans ce qui pourrait être grave. » 
Olivier Nakache, producteur

« Je veux des rôles intéressants… voilà où s’arrête mon plan de carrière. »
« Quand j’ai rencontré Agnès, un miracle s’est produit : et dans ma vie, et dans mon écriture. » 
Jean-Pierre Bacri

Bacri, comme un air de famille 

Documentaire (92 min – 2022) – Auteur Stéphane Benhamou – Réalisation Stéphane Benhamou et Erwan Le Gac – Production Siècle Productions – Raconté par Gilles Lellouche

Avec la participation de Anne Alvaro, Pierre Arditi, Nathalie Baye, Jean-Pierre Bouvier, Alain Chabat, Olivier Doran, Dominique Farrugia, Attica Guedj, Sam Karmann, Jean-Michel Ribes, Olivier Nakache et Éric Toledano

Bacri, comme un air de famille est diffusé vendredi 27 janvier à 22.35 sur France 5
À (re)voir sur france.tv

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